Bharata Natyam

Le Bharata Natyam, art sacré de l’Inde du sud prend sa source dans la région Tamil Nadu, Etat au plus au sud de l’Inde.
Il a connu diverses appellations comme Kuthu, Dakshinaya, Sadir Nautch ou encore Dasi attam avant qu’il soit nommé au XXe siècle Bharata Natyam, soit Théâtre Total de l’Inde.

Les fondements de cet art ancestral sont issus du Natya Shastra de Bharata Muni. Cet ouvrage bimillénaire, véritable encyclopédie de l’esthétique du théâtre indien aborde les différents aspects de ce spectacle total qui englobe la poésie, le théâtre, le jeu dramatique, la danse, le chant et la musique.
Les danseuses appelées devadasis (servantes des dieux) pratiquaient à l’origine cette discipline dans les temples. Généralement initiées à un haut degré d’enseignement, les devadasis transmettaient la forme narrative dite “abhinaya” (théâtralité) et les nattuvanars (maîtres de danse) la forme abstraite dite “nritta” du Bharata Natyam.
De nos jours, les danseuses et danseurs ont quitté l’enceinte exclusive des temples et reçoivent leur enseignement d’un seul maître qui réunit ses deux savoir-faire.

Le Bharata Natyam contient deux aspects fondamentaux : la danse pure “nritta” et la danse narrative “abhinaya”.
Le mot “nritta” provient de la racine sanskrite “Nrit” qui signifie “danser” et que l’on traduit par danse pure ou abstraite . “Nritta” est constituée de séquences rythmiques , cette danse abstraite ne véhicule aucune histoire. Les pas ou “adavus”, les mouvements de nuque et du regard ainsi que la gestuelle des mains suivent avec précision le rythme des cymbales “tala” et de la percussion de l’Inde du sud “mridangam”. La variété des frappes de pieds créent des formes élaborées pendant que le reste du corps suit le flot de la mélodie “rag” accompagnée de notes de musique “swara” ou de syllabes rythmiques “shollukattu”. Ainsi, la fermeté des frappes de pieds contraste avec la fluidité de l’ensemble chorégraphique.

En danse “nritta” la gestuelle des mains “hasta mudras” a pour fonction majeure d’embellir le mouvement. Cette gestuelle joue parfois avec la rythmique et lui confère un caractère ludique.
La nature de la composition teinte la couleur des mouvements ainsi que sa complexité rythmique mettant en lumière tantôt la force tantôt la douceur de l’expression corporelle.

Le mot “abhinaya” est un terme sanskrit. “Abhi” signifie “vers” et “naya” “fait de conduire”. La danse narrative “abhinaya”, traduit par théâtralité, sert à conduire le spectateur vers la signification profonde du poème à l’aide d’une gestuelle des mains “hastas mudras” codifiée, de déplacements corporels et d’ expressions faciales d’une grande variété.

Ainsi, le “bhava”, émotion communiquée par l’artiste se projette dans le coeur du spectacteur qui reçoit le “rasa” ou plaisir esthétique. Provenant de la racine sanskrite “ras” soit goûter, le “rasa” signifie suc, soit la quintessence du plaisir esthétique.
Quatre registres de jeux théâtraux ou “caturvidha abhinaya” sont utilisés pour exprimer une multitude de variations émotionnelles et amener le spectateur à se délecter du “rasa”.
Le langage du corps “angika abhinaya”, et précisément la gestuelle universelle des mains sert le texte poétique chanté “vacika abhinaya” portés par le les ornements, le costume et le maquillage “ahârya abhinaya”. A ces trois registres de jeux s’ajoute “sattvika abhinaya”, véritable manifestation corporelle de l’état émotionnel intérieur grâce auquel le “rasa” prend toute sa dimension.

La plupart des poèmes des pièces narratives “abhinaya” s’inspirent de célèbres épopées de la mythologie hindoue tels le “Râmâyana”, le “Mahabharata”, le” Bhagavad Gîta”…Mais les compositions théâtrales peuvent aussi s’exprimer sous formes de versets relativement courts, issus d’antiques textes sacrés appelés “vedas”.
Le Bharata Natyam présente ainsi trois types de compositions : “nritta”, “abhinaya” ou une combinaison harmonieuse de ces deux aspects alternés appelés “nrityam”.
Les pièces du récital traditionnel de Bharata Natyam sont orchestrés par le maître de danse “nattuvanar” qui bat les cymbales “tala”. Le nattuvananar guide le chanteur, le percussionniste au “mridangam”, et un musicien qui joue d’ un instrument harmonique qui peut être soit le violon, soit la flûte, auquel s’ajoute parfois la “vina”, instrument à cordes emblématique de la musique karnatique (Inde du sud).

 

Je dédie cette page à mes maîtres de danse indiens : Sri Herambanathan (Thanjavur-Inde du sud), Shrimati Sucheta Chapekar (Pune-Inde du sud) et à mon professeur Armelle Choquard (Arles-France).

 

Photos © Gabriel Martinez